Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
30 juin 2008 1 30 /06 /juin /2008 08:03
   
      Après avoir examiné la logique interne des religions face au conflit, voyons ce qu'il en est compte tenu des nombreuses études anthropologiques et sociales entreprises.
   
    La proclamation fréquente de la neutralité religieuse des religions face au conflit entre les groupes politiques et sociaux (préférence pour le rassemblement de l'Eglise ou de l'Umma) - ce qui ne les empêche pas de souvent développer deux versions, l'une exotérique (pour tout le monde), l'autre ésotérique (faite pour et par des groupes précis) de leur doctrine  - n'est pas générale et est toujours fallacieuse.
 Quand le judaïsme se proclame religion de Juda, elle englobe d'abord uniquement des Juifs, mais quand on connaît le bigarrement de la Palestine à l'époque de sa création, il est permis de douter de sa vocation à représenter un peuple homogène. Quand le christianisme se proclame universel dans son amour du prochain, il n'hésite pas à proclamer des Croisades pour reprendre Jerusalem.
     
        En fait, une religion possède une influence sur la politique selon trois modes différents (Henri DESROCHES) :
- attestataire, elle légitime le statu quo, l'ordre établi, et joue comme facteur d'intégration à la société existante et à l'adhésion au groupe dominant ;
- contestataire, elle s'oppose à une tradition jugée caduque, lutte contre une évolution interne à la société, que cette évolution soit favorable ou défavorable à certains groupes sociaux déterminés ;
- protestataire, elle peut aller de la sécession à la subversion des institutions officielles. cela va de l'exil volontaire d'un groupe social à la conquête des esprits pour une domination politique par un ensemble précis de populations.

       Le conflit doctrinal traverse toutes les religions et constitue l'indice, mais non la cause ou l'effet,  d'une implication de ces religions dans l'ensemble des conflits d'une société et entre sociétés différentes. Il porte souvent sur un élément personnel, comme par exemple dans le bouddhisme.
"Inutile de dire que le conflit doctrinal est une dimension fondamentale du système, et qu'il ne faut nullement essayer de l'interpréter en recourant à une clé économique ou sociopolitique. Quel que soit son enjeu, le "programme" religieux précède le "jeu", la mise en oeuvre dans l'histoire humaine, et se perpétue en termes religieux ; ses conséquences sur d'autres sous-systèmes qui forment l'histoire sont incalculables et le plus souvent inattendues.
Le système des sectes du Hinayana est compliqué, et plusieurs maillons nous manquent pour le reconstituer. Cependant, il existe une dichotomie fondamentale, tout comme dans d'autres religions (jaïnisme, christianisme et islam), entre une tradition "pauvre" et une tradition "riche", entre une  tendance entropique et une tendance transcendantale. La première accentue la dimension humaine du fondateur ; la seconde sa dimension divine.(...). Le premier schisme dans le boudhisme (...) concerne la qualité de l'arhat (le postulant au bout du chemin de la libération), libéré ou exposé à la souillure. (...) Les deux partis trouvent un seul compromis parmi cinq points en litige, mais la communauté se scinde sur la question impossible à trancher de la pollution nocturne (au sens sexuel, notez-bien) des arhats, la majorité du samgha soutenant que l'arhat peut être séduit en rêve par les déesses, alors que les Anciens s'opposent à cette idée." (Mircea ELIADE)

      Les raisons pour lesquelles, dans les conflits de doctrines et plus généralement dans les conflits des religions, l'une triomphe de l'autre ne relèvent pas du fait que les dieux ou Dieu soit avec elle, à moins précisément d'avoir la foi... et de ne pas se poser de questions (anthropologiques ou sociales).
  Le développement du confucianisme en Chine (religion d'Etat jusqu'en 1911) correspond à l'expansion de l'Etat et favorise la patience du fonctionnaire plus que les élans du militaire.
"Le confucianisme n'assigne à l'être humain aucun autre but que celui de parfaire son humanité en remplissant ses devoirs selon ce qui est propre et correct : le père doit être père et le fils doit être fils.
"En effet, la société humaine doit être réglée par un mouvement éducatif qui part d'en haut et qui correspond à l'amour paternel (pour un fils) et un mouvement de révérence qui part d'en bas et qui équivaut à la piété filiale, seul devoir confucéen dont le caractère absolu semble porter une empreinte quasi passionnelle. Enfreindre la règle de la piété (envers sa famille, son chef, sa patrie, son empereur, etc.) c'est la seule définition du sacrilège selon le confucéen. Il est évident qu'une telle idéologie paternaliste peut dégénérer plus facilement que d'autres en une obéissance aveugle aux intérêts d'un Etat totalitaire". (Mircea ELIADE)

     La marche d'une civilisation est ponctuée de conflits qui intéressent à la fois des aspects moraux (personnels) et des aspects socio-politiques (collectifs) et la forme évoluante de la religion constitue souvent un lieu entre ces deux catégories d'aspects.
   Les conflits séculaires entre sédentaires et nomades, entre chasseurs et cultivateurs, portent une marque religieuse, simplement parce qu'avant la sécularisation, il n'y a tout bonnement pas de différence entre l'ordre surnaturel et l'ordre naturel.
   L'étude des mythes et des conflits dans les sociétés traditionnelles éclaire leurs liens.
 "Pour la plupart des conflits relatés dans les mythes, il existe la possibilité d'évoquer des événements historiques qui se trouveraient être à leur origine. On a pu, par exemple, interpréter la victoire de Mardouk sur Tiamat comme la transposition sur le plan mystique de l'avènement de la civilisation urbaine et du pouvoir des hommes sur l'ancienne civilisation néolithique aux traditions matriarcales. Dans cette optique, Tiamat symbolise la "Grande Mère", la déesse de la fertilité qui régissait l'univers dans les premiers temps de l'agriculture" (Pierre CREPON)
   Deux catégories de mythes sont mises en évidence : les mythes de la création du monde, liés aux origines des peuples, et les mythes eschatologiques, liés aux destinées de ces mêmes peuples. Les études de René GIRARD des mythes de création du monde et des sacrifices, comme des rites qui les remémorent constamment, permettent de voir l'entreprise de maîtrise de la violence à l'intérieur des groupes sociaux. Les études des mythes eschatologiques montrent la projection mentale du groupe dans l'avenir, et partant du rôle de son dieu dans la fin du monde.
 "Ces prophéties sont en général de type apocalyptique, et elles laissent souvent la place à l'apparition d'un Sauveur dont l'arrivée sera le signe de la fin des temps. Lors des époques difficiles, une telle mythologie eschatologique est capable de servir de catalyseur à des entreprises débouchant sur la violence." (Pierre CREPON). Elles servent souvent de motivations pour la lutte contre d'autres groupes sociaux pour la gloire de Dieu ou des dieux.
Paix à l'intérieur, guerre à l'extérieur, les religions semblent le creuset de l'unité et de l'énergie conquérante des peuples.

     Les buts des créateurs des livre sacrés, dans une lecture marxiste du rôle des religions, peuvent se révéler à une exégèse serrée des textes et à la connaissance du contexte de leur rédaction. Ainsi AL-ASSIOUTY mène un ensemble de recherches comparatives, peu connues, entre Bible et Coran notamment.
 "La propriété privée des moyens de production se cristallise avec l'élevage et la haute agriculture, par rapport au bétail et à la terre. La propriété privée du bétail est complète et parfaite, elle s'étend aux esclaves, hommes et femmes, et comprend les autres biens meubles, les produits de l'industrie artisanale et les métaux précieux. Tel est le cas des tribus vivant principalement d'élevage : Aryens de l'Inde, Grecs homériques, premiers Romains. En sus du bétail, la terre, chez les peuples sédentaires, pratiquant la haute agriculture, forme aussi l'objet de la propriété privée, chez les Indiens, les Grecs et les Romains, comme chez les Arabes sédentaires des oasis."
"Les Livres Sacrés ont un rôle précis, ils sont formulés pour apposer le cachet de la religion sur les besoins des classes supérieures au pouvoir, afin d'être à même de mieux exploiter les classes subjuguées. Cela ressort clairement par l'examen des règles juridiques que comprennent les Livres Sacrés et les intérêts protégés par ces règles, qui sont les intérêts des classes possédantes au pouvoir, au détriment de la masse du peuple et des esclaves. L'injustice humaine est imputée à la justice divine.
C'est l'ère de l'aristocratie militaire : aristocratie, parce que le pouvoir réel est exercé par une classe privilégiée, généralement héréditaire ; militaire, parce que cette aristocratie vise à l'organisation des forces armées de la société, afin de provoquer des guerres ayant pour but la rapine. La religion approuve la guerre agressive, les prêtres de chaque tribu portent en guerre l'arche de Yahvé ou les idoles des dieux afin d'assurer la victoire. L'appât du butin active les guerres atroces d'extermination et de capture, le prêtre-roi, ses chefs et ses religieux obtiennent la meilleure part du butin : or et trésors, chevaux de races, belles femmes.
Le brigandage, organisé dans les Livres Sacrés, devient l'institution dominante de la civilisation." (AL-ASSIOUTY)

     Ce sujet des relations entre conflits et religions ne peut évidemment pas avoir ici sa conclusion. Considérons ces trois articles comme une amorce de réflexions plus précises.
 
 
     Dans son introduction au livre Guerre et Religion, publié sous sa direction, Jean BAECHLER (né en 1937), sociologue français, analyse les relations entre guerre et religion, en tenant compte des faits et pas seulement des fondements de l'une et de l'autre. "Finalement, écrit-il, les faits interdisant de soutenir soit que la religion et la guerre entretiennent des liens organiques, soit qu'elles se sont rencontrées par accident et par un hasard historique. Il faut creuser plus avant le paradoxe, ei on veut le résoudre d'une manière qui colle aux faits et les explique. Pour n'y pas trop échouer, la seule issue rationnelle est de partir d'une analyse conceptuelle tant de la guerre que de la guerre, de manière à se donner les moyens de trancher entre deux thèses. Selon l'une, les deux concepts sont effectivement liés. Selon l'autre, ils sont étrangers l'un à l'autre, mais ont aussi des réserves de séduction à faire valoir dans les deux sens."
Après avoir développé des lignes d'une argumentation qui tient compte surtout d'un point de vue distancier et empreint de laïcité, le sociologue estime la conclusion imparable : "la guerre relevant du public, et la religion du privé et de l'intime, elles n'ont pas de rapport direct. C'est la conclusion de l'analyse conceptuelle. mais elle est si massivement et si constamment contredite par les faits historiques les plus assurés qu'il convient de résoudre de résoudre la contradiction. Pour y réussir, il faut partir de l'hypothèse que la religion et la guerre ont des séductions l'une pour l'autre. La sociologie révèle plutôt l'intelligibilité des services rendus à la guerre par la religion, alors que l'histoire illustre davantage la liaison inverse de la guerre appuyant la religion."
Après avoir mis sur la table les services que la religion donne à la guerre et que la guerre donne à la religion, Jean BAECHLER écrit dans une conclusion que "le bilan est sans appel : la religion sert la guerre bien plus que celle-ci ne la sert. Le verdict étonnera peu qui est persuadé de la centralisé du politique dans les affaires humaines et de la guerre dans les développements politiques depuis l'autre de la néolithisation. Pour l'anthropologie comme science de l'humain, le constat est riche d'enseignements, moins pour l'étude de la guerre que pour celle de la religion. En effet, la polémologie doit prendre en compte la religion comme, par ailleurs, l'économie et la technique, entre autres, car la guerre a besoin de justifications idéologiques directes ou indirectes par l'entremise des régimes politiques. Elle les trouve toujours, car l'idéologie peut détourner à son usage n'importe quel corpus de cognitions, même la science, quand la théorie de l'évolution est subvertie en lutte pour la vie au bénéfice du plus fort. Il se trouve que les représentations les lus exploitées pendant des millénaires ont été religieuses, parce qu'elles étaient disponibles et faciles à falsifier idéologiquement, et non parce que la guerre a des affinités électives avec la religion. 
L'inverse est tout aussi vrai, poursuit-il, et même davantage encore : la religion n'a rien à voir avec la guerre, tant que la politique ne s'en mêle pas. L'anticléricalisme et l'antireligion modernes ont, sans doute, plaidé que les religions à vocation universelle sont de nature intolérantes, puisqu'elles détiennent seules la Vérité la plus essentielle, et que, étant intolérantes, elles recourent au bras séculier pour s'imposer par la force. Mais l'accession n'est pas pertinente ni convaincante, car une religion universelle fidèle à son concept s'adresse à tout être humain dans son humanité, en lui proposant une destination plausible, à laquelle il peut se résoudre par une conversion libre de la sensibilité, de l'intelligence et de la volonté. Recourir à la force pour imposer cette conversion est une aberration religieuse, car c'est favoriser l'hypocrisie, ce qu'il y a de pire du point de vue de l'Absolu religieux. Il est vrai que les autorités religieuses succombent toujours à la tentation de prendre appui sur les autorités politiques pour s'imposer aux incroyants et aux récalcitrants, mais la tentation naît de ce que les autorité politiques sont empressées à leur proposer leur appui. La transgression conceptuelle est originaire du politique, non de la religion. La liaison est, de fait, dissymétrique. Les conséquences sont négligeables pour la logique politique et guerrière, car celle-ci se contente de transformer la religion en idéologie commode quand le contexte culturel est religieux. Par contre, les dommages infligés à la religion et aux religions sont graves, car elles sont déviées de leur finalité naturelle dans le sens de la corruption et de la perversion. Tuer au non du Christ Roi ou d'Allah contredit la nature des choses et révulse la conscience."

     Sous la direction de Geoffrey WIGODER, Dictionnaire encyclopédique du judaïsme, Cerf/Robert Laffont, 1996. Sous la direction de Mohammad Ali AMIR-MOEZZI, Dictionnaire du Coran, Robert Laffont, Bouquins, 2007. Sous la direction de Jean-Yves LACOSTE, Dictionnaire critique de théologie, PUF, Quadrige, 1998. Kurt FRIEDRICHS, Ingrid FISCHER-SCHREIBER, Franz-Karl ERRHARD, Micael DIENET, Dictionnaire de la sagesse orientale, Robert Laffont, Bouquins, 1989. Sous la direction de Philippe GAUDIN, La violence, Ce qu'en disent les religions, Les éditions de l'atelier/Les éditions ouvrières, 2002. Michel DOUSSE, Dieu en guerre, La violence au coeur des trois monothéismes, Albin Michel Spiritualités, 2002. Claude RIVIERE, Socio-anthropologie des religions, Armand Colin, Cursus, 2003. Pierre CREPON, Les religions et la guerre, Albin Michel, Espaces libres, 1991. Sarwat Anis AL-ASSIOUTY, Civilisations de répression et forgeurs de livres sacrés, Letouzé & Ané, 1995. Mircea ELIADE et Ioan COULIANO, Dictionnaire des religions, Plon, Agora, 2001. Sous la direction de Jean BAECHLER, Guerre et religion, Hermann Editions, 2016.
 
 
Complété le 19 décembre 2017.

                                                                                                
                                                                                                                            RELIGIUS
Partager cet article
Repost0
24 juin 2008 2 24 /06 /juin /2008 14:18

 

      Du côté des religions monothéistes (Islam, Chrétienté, Judaïsme), les choses changent quant au conflit car non seulement une vision du monde entre Bien et Mal est souvent introduite, mais le conflit entre les puissances d'en haut impliquent plus intimement les hommes jusqu'à les éclipser en faveur des relations humaines, et surtout l'eschatologie est au coeur de leur révélation : la lutte, la mort et la résurrection personnelle est étroitement liée à une morale.

             Pour le Judaïsme, le monde né dans la violence est entaché par le péché originel. Dès la Genèse (4, 1-16), un conflit entre frères se termine par un meurtre. Tout au long du texte de la Bible se retrouve cette faute d'un peuple sans cesse rappelé à l'ordre par un Dieu unique, jaloux et coléreux. Face aux autres peuples, le peuple de Dieu se voit offrir une Alliance par ce Dieu unique, en échange de son Obéissance exclusive à ses Lois. La tradition talmudique et l'exégèse juive médiévale, qui atténue la violence des textes bibliques, passent au crible d'une interprétation modératrice les motivations, l'application et la finalité de ces Lois. Même si la misère, la violence et la mort dans le monde ne peut venir que de l'homme lui-même, la prise de conscience de cette responsabilité constitue la voie privilégiée pour reconnaître Dieu, qui est justice.
    La tradition juive s'efforce de trouver cette voie en élaborant un ensemble jurdidique complexe qui mène le peuple juif vers la justice du Seigneur, remplissant ainsi les conditions de l'Alliance. Ce peuple balloté par les évènements, les cataclysmes naturels, les multiples invasions étrangères, ce peuple déporté, opprimé, exilé, persécuté au long des siècles par les autres peuples, il trouve son salut dans l'accomplissement de cette Alliance. Non dans l'établissement d'un royaume terrestre - courte expérience d'une gloire des armées - mais dans la découverte d'une Terre Promise gagnée par l'observation aux Lois.
    Les Dix Commandements préservent le peuple juif des travers des autres peuples, de l'idolâtrie de plusieurs dieux, de la luxure et du meurtre, et par là, donnent une vision négative du conflit, porteur de tant de malheurs. Les textes bibliques fourmillent à chaque étape de l'histoire de mises en garde sur la haine du frère contre le frère, du père contre le fils, de la mère contre la fille...
Mais la responsabilité du mal n'incombe pas au peuple juif. "La perspective biblique affirme sans ambiguïté possible la responsabilité divine dans l'existence du bien et du mal. (...)   A la différence du dualisme perse qui estime que le bien et le mal proviennent de sources différentes, la Bible affirme que le mal fait partie de la structure de la création divine. (...) Le mal, comme tout ce qui est fait par le Créateur, a une fin qui fait partie du projet de Dieu. (...) En même temps, la Bible reconnaît la difficulté de l'homme à comprendre l'existence du mal, et lui permet de s'exprimer pour protester contre la souffrance, la douleur et l'injustice dans le monde". "A la question de savoir pourquoi le mal frappe le juste et pourquoi les méchants reçoivent le bien, les sages proposent plusieurs réponses. La première est que les justes sont punis pour les péchés de leurs pères, alors que les méchants prospèrent grâce aux mérites de leurs pères. (...) Le Talmud met en cause cette réponse et en suggère une autre : lorsque le mal frappe le juste, c'est parce qu'il n'est pas complètement juste ; et quand le méchant bénéficie du bien, c'est qu'il n'est pas complètement méchant. Contrairement à la Bible qui ne connaît pas la notion de récompense dans le monde à venir, les sages l'utilisent  pour répondre au problème de l'absence de justice dans ce monde. La souffrance qui est le lot des justes et le bien dont jouissent les méchants ne sont qu'une infime partie de la véritable sanction de leurs actions. L'essentiel de cette sanction n'étant dispensé à l'homme que dans le monde à venir." (Dictionnaire encyclopédique du Judaïsme)
        Même si par la suite, les exégèses, comme celle de MAÏMONIDE, dans le "Guide des égarés" entre autres, tentent de donner au mal également une responsabilité humaine pour ne pas en faire strictement un projet divin, on voit que le conflit n'est pas évoqué comme étant un problème relié à une cause autre que le tréfonds de l'âme humaine.
        On est très loin d'une condamnation des puissants qui abusent de leur puissance et des riches qui abusent de leur richesse. C'est l'avènement d'un monde à venir qui permettra de résoudre le problème de la souffrance du juste, opposée à la prospérité du méchant.
"Résultantes des interrogations soulevées par la récompense et le châtiment, celles posées par la notion de Résurrection inquiétaient les rabbins. Certains pensaient que cette Résurrection ne serait accordée qu'aux hommes vertueux tandis que d'autres affirmaient que les ultimes rétributions ou châtiments ne pourraient s'adresser qu'à ceux pourvus d'un corps et d'une âme (...) D'autres ne prêtaient à ces enseignements qu'une valeur purement symbolique".(Ibid)

             Le christianisme reprend cette perspective en y apportant des nuances de taille. Dans la prédication de Jésus relatée dans les Évangiles, l'accent est mis à maintes reprises sur l'éthique en ce monde. Pas seulement l'observance des Lois tel que l'enseigne le Judaïsme dont il est issu, mais aussi le primat de l'amour du prochain.
"Le Commandement de l'amour de Dieu est le plus grand et le premier, mais Jésus lui associe immédiatement, comme son semblable, le commandement de l'amour du prochain. En rappelant que l'amour est l'essentiel de la loi - dans un contexte où on tente de le mettre à l'épreuve - Jésus montre que sa doctrine ne se veut pas originale ; mais il insiste sur l'actualisation, dans le coeur et dans la pratique, du sens déjà bien connu de "loi".
Ce recentrage de la loi sur l'amour entraîne des déplacements dans l'ordre des priorités éthiques. L'amour envers Dieu n'a de sens que s'il se traduit dans l'amour du prochain, qui est la pierre de touche de la justice. Ce n'est pas par le respect des préceptes cérémoniaux et cultuels qu'on honore Dieu, mais par le secours apporté à l'homme dans le besoin. L'homme sera jugé sur son amour pour son prochain, et surtout pour le plus petit. L'amour et les oeuvres de miséricorde qu'il suscite s'adressent à l'homme le plus démuni, le pauvre, le prisonnier, le malade et l'étranger. Le pardon doit aussi toucher ceux dont la conduite est jugée répréhensible : les publicains et les pêcheurs. Les grandes paraboles de la miséricorde montrent la gratuité du don et la joie qui l'accompagne. " (Dictionnaire Critique de Théologie)
    D'un autre côté, AUGUSTIN radicalise l'opposition entre l'amour de soi et l'amour de Dieu dans "La Cité de Dieu".
         A propos du conflit, la conception de la justice du christianisme, qui étend même la nécessité du pardon aux ennemis, trouve son illustration fondamentale dans le Sermon de la Montagne. Jésus introduit lui-même si l'on peut dire les commentaires séculaires postérieurs sur l'ordre du monde. De ces commentaires sortiront des conceptions plus ou moins radicales de la justice sociale, et partant des perceptions des conflits qui ne sont plus vus sous un aspect négatif comme auparavant. Le conflit, ou plutôt le cortège des malheurs qui l'accompagnent, est de moins en moins perçu comme un projet divin, et de plus en plus comme l'expression du comportement des individus et des groupes sociaux vis-à-vis des plus exposés aux malheurs terrestres. Le problème du mal se déplace d'un projet divin à la responsabilité des actes humains, et le processus de sécularisation ira de plus en plus loin dans ce sens. Le péché est devenu le problème de l'attitude de l'homme envers son prochain.
"La théologie politique en Europe et la théologie de libération  (...) ont volontiers recours au concept de péché structurel. Ce péché se situerait à peu près à mi-chemin entre les actes mauvais individuels et l'état général de l'humanité : nous sommes moralement et spirituellement prisonniers d'injustices spécifiques, inhérentes à la manière dont le pouvoir et la liberté économique sont répartis dans la société et l'oeuvre du salut suppose le refus de cet état des choses, et l'injonction d'avoir à le transformer." (Ibid)

       L'Islam, qui se conçoit lui-même comme la réorientation des révélations judaïque et chrétienne, fait de l'ordre surnaturel la même chose que l'ordre naturel sur Terre.
"Alors que dans la Bible le concept de création absolue est tardif, comme le monothéisme rigoureux qui en découle, et que l'histoire y joue un rôle référentiel plus déterminant que l'origine et l'eschatologie, et que l'élection y prend bientôt la forme de messianisme, le Coran privilégie la référence absolue, indépassable et universelle de création. C'est même parce que rien ne saurait s'opposer au signe de Dieu dans la création que la faute originelle n'y déploie que des conséquences secondaires de rivalité entre les hommes. Le signe de création, le caractère absolu de l'action créatrice et ses répercussions sur la conception de la transcendance divine n'y rencontrent point les atténuations de l'incarnation rédemptrice. (...)" (Michel DOUSSE, Dieu en Guerre).
   L'autonomie humaine est donc moins affirmée en terre d'Islam. De toute façon "si tous les êtres sont marqués par le péché, c'est que celui-ci est le principal moteur d'une dynamique qui ne cesse d'éloigner ou de rapprocher l'homme de Dieu" "Les malheurs de l'homme sont donc la conséquence directe de ses péchés, bien que sur cette terre Dieu lui accorde une grande latitude. (...) En somme, l'existence terrestre est le lieu où l'homme accomplit un certain nombre d'actes qui sont mis à son actif ou à son passif dans le livre de ses oeuvres et dont il devra rendre compte devant Dieu". (Dictionnaire du Coran). Dans l'étroitesse du déterminisme de la création, la créature n'a que peu de possibilités d'agir, mais elle doit se conformer aux lois de Dieu pour trouver son salut personnel.
     Ordonner le bien et interdire le Mal est un impératif inscrit dans le Coran qui a été beaucoup discuté. Ainsi AL-GHAZALI et beaucoup de commentateurs ont atténué et précisé cette disposition, qui peut mener à des actions extrêmes. "L'ordre coranique d'ordonner le bien et d'interdire le mal a été rangé dans la catégorie des devoirs communautaires et non comme un devoir incombant personnellement à tout musulman : si certains musulmans s'y conforment de telle manière que sa finalité s'en trouve réalisée, le reste de la communauté n'est plus concerné par cet impératif. De rares  savants l'ont franchement vidé de toute substance alors que d'autres, aussi peu nombreux, ont en revanche défendu la thèse qu'il s'agissait là d'une obligation pour tout musulman" (Ibid). La question du mandat politique pour de telles actions est évidemment posée, pour qui et pour quoi faire en priorité. La légistation coranique s'efforce d'y répondre et de multiples écoles - à l'image de ce qui s'est passé pour les deux autres religions monothéistes - y ont répondu de manières "multiples".
     La notion de jihad traverse tout le Coran et bien plus que dans la Bible et les textes chrétiens, c'est la question de la défense de la Croyance qui est mise en avant comme devoir du Croyant. L'aspect militaire et guerrier de cette défense, né dans les circonstances mêmes de la fondation de l'Islam n'a jamais supplanté le "grand jihad", c'est-à-dire la lutte contre le mal en soi-même. On y trouve d'ailleurs là le fondement de la Communauté (Umma) "Pas de fraternité sauf entre musulmans" : "L'Islam a considéré la supériorité de la communauté des croyants comme leur premier sentiment unificateur : ils sont pour signe distinctif à la fois l'élection divine et le discernement entre la croyance et l'infidélité, le bien et le mal. De l'invincible affirmation, de l'unicité divine dérive le sens très ardent que possède le musulman de l'unité qu'il forme avec ses frères dans la même foi. La Umma est le peuple de Mahomet, la nation pour laquelle, selon le Hadith (le récit coranique), il intercède, et qui entend garantir à chacun de ses membres les conditions optimales de vie et, s'il est croyant sincère, la rétribution dans l'au-delà. (...) (Le Livre) guide la umma et la protège de l'erreur du fait de l'accord unanime des croyants autour de lui (...) (Il contient) les Droit de Dieu, telle l'obligation du combat. (...) Puis un certain nombre de prescriptions destinées à renforcer la communauté de vie, telle la répression de la délinquance, du crime ou de la fornication, et la réparation des dommages causés par les transgressions".(Ibid)
     Une communauté aussi centrée, avec sa pratique religieuse minutieuse, sur la défense de la Communauté ne fait pas, on s'en doute, beaucoup de cas du conflit entre membres de cette communauté. La rigueur du droit islamique enferme suffisamment le Croyant dans un réseau d'obligations et d'interdits - qui est aussi un réseau de solidarités - pour que la contestation de l'ordre établi ne soit pas courante... Bien que la faute originelle ne soit pas invoquée aussi vigoureusement qu'ailleurs pour fonder l'ordre social, le fait même d'identifier l'univers surnaturel à celui-ci, suffit à concevoir le conflit interne comme négation de cet ordre.

                                                                                                    RELIGIUS

 

Partager cet article
Repost0
23 juin 2008 1 23 /06 /juin /2008 13:52

       Outre le fait qu'il est difficile d'isoler le fait religieux, question que les religions ne se posent pas puisqu'elles se supposent avoir réponse à tout et en tout cas de dire la vérité sur tout ce que les hommes ne comprennent pas, on trouvera difficilement une définition du conflit chez elles. Par contre l'évocation de la guerre et de la violence existe en de multiples références. Sans doute faut-il y voir le fait que si les religions veulent maîtriser la violence et la guerre ou les utiliser pour le triomphe de la vérité, elles sont loin d'accepter le fait qu'elles font tout simplement partie  d'innombrables conflits, quand elles ne les provoquent pas par leur simple existence.
        
      Poser cette question, celle de l'implication des religions dans un conflit, c'est déjà avoir une lecture extérieure à leur champ d'autorité, c'est avoir déjà réduit cette autorité. Avant le mouvement de sécularisation, s'il y a parfois conflit entre le Bien et le Mal (dans les religions dualistes notamment), il n'y a pas à proprement parler conflit où les torts existent de part et d'autre, mais processus nécessaire de purification, qu'elle soit intérieure à l'homme lui-même, ou vis-à-vis des infidèles. S'il existe un conflit, c'est surtout entre grandes puissances d'en haut, et les alliances invoquées dans les Testaments judaïques et chrétiens sont une création tardive.  Ce n'est que lorsque l'esprit scientifique bat en brèche l'esprit mystique que la question du conflit est posée dans une certaine clarté.

      Une fois la laïcité installée, une fois des dictionnaires élaborés en dehors ou avec simplement le concours des autorités religieuses, la notion de conflit peut prendre tout son sens.

       On se doit, lorsque l'on examine les relations entre conflits et religions, distinguer entre les religions regroupées souvent dans la formule sagesses orientales (Bouddhisme, Hindouisme, Taoïsme et Zen) et les religions monothéistes (Judaïsme, Christianisme et Islam).
  Dans un premier temps, on doit regarder la logique interne de leurs textes et dans un deuxième temps entreprendre une approche anthropologique et sociale.



Premier temps, la logique interne des religions face au conflit.


        Lorsque le bouddhisme prône le détachement total des choses terrestres, il ne s'agit pas seulement de se libérer de la souffrance, de la violence du monde et même de ses pièges charnels, mais aussi tout simplement de faire de la relation avec l'autre, donc des conflits, une non réalité. Atteindre le nirvana, c'est atteindre la plénitude de la non existence, loin de toutes ces réincarnations.
"En réponse à la question de la cause de l'enchaînement des êtres vivants au cycle des renaissances et des moyens d'y échapper - question centrale de toute la philosophie indienne au temps de Bouddha -, celui-ci proclama les Quatre Nobles Vérités, coeur de sa Doctrine, telles qu'elles lui étaient apparues au moment de son Éveil.
Le Bouddha considère que la vie est éphémère, impersonnelle et donc douloureuse. la prise de conscience de ces Trois Caractéristiques de l'Existence marque le début du cheminement bouddhique. La souffrance est le résultat du désir et de l'ignorance dont la disparition entraîne la délivrance du Samsara (migration sans fin de l'âme de corps en corps, de mort en renaissance). Le bouddhisme explique cet enchaînement des êtres vivants au cycle des renaissances par la chaîne de la Production conditionnée. La fin de ce cycle correspond à la réalisation du Nirvana. Le chemin pour y parvenir conformément aux Quatre Nobles Vérités est le Noble Sentier octuple qui enseigne la moralité, la méditation, la sagesse et la Connaissance.". (Dictionnaire de la sagesse orientale).
Pour le bouddhisme, "l'ego n'existe pas. Il est une illusion. C'est précisément parce qu'il n'existe pas de moi substantiel, immuable, que nous cherchons sans cesse à nous assurer de son existence. L'ego est cet effort constant afin de s'établir. Lutte constante, sans fin et dérisoire. " Dans  sa contribution au livre sur ce  que disent les religions de la violence, Fabrice MIDAL insiste sur cette croyance en soi qui est "non seulement une opinion erronée, mais aussi une source d'inquiétude. Et source de conflit bien évidemment.

       La foi dans la loi du Karma constitue le point commun de toutes les formes de l'hindouisme. "Le karma, action physique ou psychique, somme de toutes les conséquences des actes d'un individu commis dans cette vie ou dans une vie antérieure, chaîne de causalité du monde moral, est ce potentiel qui guide le comportement d'un homme, et oriente les motivations de ses actes et de ses pensées présents et futurs. Tout karma est la semence d'un autre karma à venir. On récolte les fruits du karma sous forme de joie et de souffrance, selon la nature de ses actes et de ses pensées.
Bien que l'homme s'impose à lui-même les limites de son caractère - puisque celles-ci sont la conséquence de ses actes et de ses pensées passées -, il a le choix entre poursuivre ces tendances qu'il a lui-même forgées ou les combattre. Cette liberté de choix, cette possibilité d'autodétermination reflètent la liberté suprême de l'Atman ou conscience intérieure. Par l'abandon à Dieu, la quête d'un bon karma et l'effacement du mauvais, on desserre les liens de la loi du karma. Après l'illumination, on ne produit plus aucun karma." (Dictionnaire de la sagesse orientale)
L'illumination ou plutôt le véritable réveil, "l'illumination profonde révèle que vide et phénomènes, Absolu et relatif ne font qu'un. L'expérience de la Vraie Réalité passe précisément par celle de l'Unité. La forme est vide, le vide est forme. Il n'existe pas deux univers distincts. L'ego meurt, disparaît dans l'illumination profonde.
    Lorsque l'hindouisme parle de la violence du monde, il s'agit surtout de sa nécessité et de sa légitimité pour assurer l'ordre du monde sans lequel en fin de compte cette illumination ne peut avoir lieu. L'idéal de non-violence que l'on rencontre dans l'hindouisme, et aussi d'autres sagesses orientales, est directement lié au détachement de ce monde. Se faire moine dans l'ashram, c'est se retirer du monde dans un leu de paix et d'harmonie. Ce n'est d'ailleurs qu'enrichit d'une thématique chrétienne que la non-violence peut devenir un outil de combat (Véronique BOUILLIER, la violence, ce qu'en disent les religions).
     On conçoit qu'aux yeux d'un occidental, l'hindouisme puisse apparaître comme une religion du repli sur soi, de la résignation, puisque le seul conflit important à ses yeux est celui qui se joue à l'intérieur même de l'homme, qui doit choisir de se libérer de l'existence telle qu'il la connaît, pour ne pas retomber indéfiniment dans un cycle de souffrances.
Il ne faut pas oublier qu'entre cet idéal de "libération" et la religion quotidienne, existe une morale qui ne se noue que rarement en ascèse, et seulement pour une minorité de sages, une morale des relations entre individus incapables de se libérer. Même si cette morale n'ignore pas le sens des bonnes et des mauvaises actions, celles-ci sont conçues en fin de compte en fonction de ce cheminement intérieur, car la marche du monde n'a vraiment pas d'importance. Il ne faut d'ailleurs pas lui donner une importance car ce serait alors s'écarter de la vérité qui permet la délivrance. Du coup le conflit dans ce monde est partiellement nié, si l'on veut discuter des conflits sociaux. Le système des castes en vigueur consolide le cadre de l'ordre social existant, lieu de souffrances nécessaires et impossibles à éviter.

        Le tao, concept central du taoïsme, principe premier de l'univers, "agit spontanément; il suit sa nature. Son comportement est dénué d'action et d'intention, mais il n'est rien qu'il n'accomplisse. Dans le monde des phénomènes, le Tao se révèle par sa force et sa vertu; il transmet cette force aux choses et leur permet de devenir ce qu'elles sont. Réaliser l'unité avec le Tao est le but de tous les taoïstes. Il ne suffit pas pour cela d'avoir une connaissance rationnelle du Tao; l'adepte doit faire un avec le Tao en réalisant lui-même l'unité, la simplicité et le vide du Tao. Seule la connaissance intuitive personnelle permet de parvenir à ce résultat. (...) On réalise le tao en cultivant le calme qui en est la principale porte d'accès. On parvient au silence par sa méthode de la perte : Chercher la connaissance, signifie accumuler de jour en jour; chercher le tao signifie perdre de jour en jour (...) En demeurant dans le calme, on abolit toute manifestation intérieure et extérieure, on efface toutes les limites et toutes les continuités." (Dictionnaire de sagesse orientale). C'est là-aussi une voie pour la suppression des souffrances de ce monde. Un des deux courants constitutifs du taoïsme, le taoïsme philosophique, est marqué par de fortes composantes politiques. Son concept, c'est le non-agir, l'absence d'intention dans l'action, et il s'oppose même au confucianisme et à ses deux vertus cardinales, la bienfaisance et la justice, qui masquent la véritable nature de l'homme et gênent le Tao. On conçoit que là encore, le seul conflit important, qui doit éclipser tous les autres, soit le conflit intérieur, pour suivre la voie de la délivrance.

            Le zen, abréviation du mot zenna chinois en japonais est "dérivé lui-même du sanskrit dhyana qui désigne la concentration de l'esprit et le recueillement, état  dans lequel s'abolissent toutes les distinctions entre Je et Tu, sujet et objet, vrai et faux."
C'est du point de vue ésotérique que le zen est le plus intéressant pour la réflexion sur le conflit : "Le zen n'est pas une religion, mais la racine indéfinissable et incommunicable, que l'on ne peut expérimenter que par soi-même. Dénuée de tout nom, de tout qualificatif, de tout concept, elle est la source de toutes les religions qui sont autant de formes d'expression de cette même expérience. Dans ce sens , le zen n'est lié à aucune tradition religieuse particulière, pas même à la tradition bouddhiste. Il est la perfection originelle de toute chose et de tout être, commune à l'expérience de tous les grands saints, sages et prophètes de toutes les religions, quels que soient les noms les plus divers employés pour la désigner. Dans le bouddhisme, on l'appelle identité du samsara et du nirvana. Le zazen n'est pas une méthode permettant de mener à la délivrance l'homme qui vit dans l'ignorance, mais l'expression immédiate, l'actualisation de la perfection qui habite chaque homme à chaque instant." (Dictionnaire de la sagesse orientale). Là encore, le conflit réel est le conflit contre l'ignorance que l'homme a de sa condition et de la véritable vacuité du monde.

          Ces quatre sagesses orientales, auxquelles il faudrait ajouter une religion officielle, d'Etat, le confucianisme qui  amoindrit d'ailleurs cet aspect de volonté de détachement du monde, contribuent à nier l'importance du conflit avec les autres hommes pour se concentrer sur le seul conflit intérieur, conflit entre des illusions de la réalité qui enferre l'homme dans la souffrance sans fin et la vérité fusionnelle de l'univers.
     Toutes ces réflexions ne sont de toute évidence que trop générales pour faire de la sagesse orientale une sagesse de la résignation, mais on voit tout le profit que peut tirer toute une foule de possédants de pouvoir et de richesse, de telles idées répandues dans l'ensemble de la société.

                                                                                     RELIGIUS
Partager cet article
Repost0

Présentation

  • : LE CONFLIT
  • : Approches du conflit : philosophie, religion, psychologie, sociologie, arts, défense, anthropologie, économie, politique, sciences politiques, sciences naturelles, géopolitique, droit, biologie
  • Contact

Recherche

Liens