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17 novembre 2008 1 17 /11 /novembre /2008 16:23
   On ne trouve guère de définition de la guerre dans les différents dictionnaires d'économie, tout juste une évocation brève du rôle des dépenses militaires dans le cadre des dépenses publiques, elles abondamment décrites. La guerre est généralement conçue comme une fonction extérieure au fonctionnement économique. De même d'ailleurs que les dépenses militaires.
  "Le fait notable de la production militaire moderne est qu'elle reste à l'extérieur (des forces de contrôle démocratique). Ainsi, elle est ignorée par la formation économiques dominante, avec quelques exceptions spécifiques, et par la plupart des recherches économiques ou des discussions formelles. Une très grande composante de l'activité économique actuelle, importante par ses commandes de ressources, pressante par ses implications sociales et politiques, est effectivement ignorée par les économistes modernes. Elle n'est pas incluse dans les modèles économiques agréés ; donc d'un point de vue académique, elle n'existe pas." (John Kenneth GALBRAITH).

   La plupart des études sur les relations entre Guerre et Économie se focalisent sur un versant ou un autre, en amont ou en aval, rarement dans les relations dynamiques entre l'une et l'autre. Soit il s'agit d'études portant sur les causes économiques des guerres, soit sur leurs conséquences. Les dépenses militaires, comme préparations à la guerre, sont pour la plupart négligées par les auteurs économiques.
 
    Pourtant quatre des plus grands auteurs des théories économiques ont tous plus ou moins discuté des relations entre guerre et économie sans en faire des éléments déterminants. Adam SMITH dans ses "Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations (1776), Karl MARX et Friedrich ENGELS dans certains chapitres de "Le Capital" (1867-1894), John Maynard KEYNES dans ses "Conséquences économiques de la paix" (1919) et son "Comment financer la guerre?" (1940) et Joseph SCHUMPETER dans "Business Cycle" (1939) et "Capitalisme, Socialisme et Démocratie" évoquent parfois très précisément le rôle des dépenses militaires, les apports économiques des conquêtes militaires ou les productions de moyens de destruction. On évoquera aussi, pas seulement à la marge, le livre de Raymond ARON sur "La société industrielle et la guerre" (1959).
  Il faut signaler également Friedrich LIS, économiste américain, qui en 1857, choisit pour objet d'études, la puissance et pense globalement la richesse, qu'elle soit acquise en temps de paix ou en temps de guerre.
 
      Pourtant, comme l'écrivent Jean-François DA GUZAN et Pascal LORIOT (Guerre et Économie), "l'influence de la guerre sur l'économie et pour le moins de la préparation de la guerre sur l'économie (a) globalement été la règle pendant environ 130 ans, c'est-à-dire de la guerre de Sécession à la fin de l'Union Soviétique."
   - La guerre constitue un vaste vol à main armée de richesses de tout ordre et en tant que telle, elle fait pratiquement partie de l'économie (après, un peu moins...) jusqu'à l'ère industrielle du XIXème siècle. D'ailleurs, le mercantilisme anglais ou français intégrait très bien les deux dimensions pacifiques et guerrières d'acquisition de ces richesses.
  - L'économie militaire constitue un état naturel de l'économie mondiale entre 1860 (pour ne pas dire un peu avant, juste après les guerres napoléoniennes par exemple) et 1990, des entreprises coloniales systématiques à la chute de l'Union Soviétique. Entre complexe militaro-industriel américain et stratocratie soviétique (pour emprunter un terme de Cornélius CASTORIADIS), une forte compétition eut lieu pour mettre en oeuvre dans les armées le meilleur de la technologie dans tous les domaines.
Mais malgré le fait que l'économie militaire ait le plus fort impact sur l'économie globale entre les dates citées (et malgré ce que ces auteurs en disent...), vu la persistance de fortes dépenses militaires, il fait bien constater qu'elle garde une importance certaine d'une manière constante dans les économies modernes, quel que soit l'état des relations internationales.
  - Pour divers économistes marxistes, mais pas seulement, la production de moyens de destruction et les destructions elles-mêmes, sont nécessaires au fonctionnement de l'économie capitaliste, que ce soit au niveau national ou mondial. (Ernst MANDEL (1923-1995), Rosa LUXEMBOURG (1871-1919), LENINE (1870-1924), Paul BARAN (1910-1964), Paul SWEEZY (1910-2004), Gunder FRANCK (1929-2005)).
  - Pour plusieurs économistes libéraux, au contraire, la guerre n'a plus de raison d'être, n'a plus d'avenir dans une société développée et constitue, au minimum, et surtout au niveau des dépenses improductives d'armements, une menace constante pour les progrès du système capitaliste, compris comme seul système viable. (Seymour MELMAN (1917-2004), Vilfredo PARETO (1848-1923), WALRAS (1834-1910), KEYNES (1883-1946)).

Sous la direction de Jean-François DAGUZAN et Pascal LOROT (institut Choiseul pour la politique international et la géoéconomie), Guerre et Economie, Ellipses, 2003. Edward Mead EARLE, Les maîtres de la stratégie, tome 1, Bibliothèque Berger-Levrault, collection Stratégies, 1980. Raymond ARON, La société industrielle et la guerre, Plon, 1959. Sous la direction de Jacques FONTANEL, Économistes de la paix, Presses Universitaires de Grenoble, 1993.

  N.B. Il existe une association - internationale - d'économistes réfléchissant sur les relations Économie, Guerre et Défense, fréquemment consultés par les instances internationales, dont l'ONU : Économistes de la paix (ECCAR) : Espace Europe, BP 47, 38040 GRENOBLE CEDEX 9.
 
Relu le 26 octobre 2018
 
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