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17 novembre 2013 7 17 /11 /novembre /2013 08:28

    Le Grand Robert 2014 donne quatre acceptions du mot Agression, dont l'étymologie proprement dite remonte à 1395, du latin agressio, attaque.

- En droit pénal, il s'agit de l'attaque contre les personnes ou les biens protégés par la loi pénale. En droit international, d'une attaque armée d'un État contre un autre, non justifiée par la légitime défense. comme par exemple l'agression hitlérienne contre la Pologne. Condamnation des guerres d'agression. Politique d'agression et de violence, ou politique défensive.

- Attaque violente contre une personne. Agression nocturne. Agression à main armée (voir Attentat, hold-up). Agression suivie de violences, de viol.

- Par extension, comportement qui vise à blesser moralement. Cette critique est une véritable agression. En psychologie : Les agressions de la vie urbaine (voir Stress). La publicité est pour lui une agression insupportable.

- Tiré de l'anglais aggression, en psychophysiologie, c'est l'attaque de l'intégrité des fonctions physiques ou mentales de l'individu, par un agent externe générateur de maladie (voir Agresser, voir Stress). En psychanalyse, instinct, pulsion d'agression (tiré cette fois de l'allemand). Instinct fondamental de l'être vivant, lié (selon les uns) à la destruction (pulsion de mort) ou (selon les autres) à l'affirmation de soi. Également, agression tournée contre soi-même (voir Masochisme). Agression exercée contre autrui (voir Sadisme). 

Entre êtres vivants, en général : Interaction entre animaux qui s'affrontent, attitude d'un animal qui chercher à attaquer, repousser et à détruire un autre animal (de même espèce ou d'espèce différente). Instinct (ou "sous-instincts") d'agression. L'étude de l'agression est un des sujets essentiels de l'éthologie (voir aussi Agressivité).

- Sur les choses (là c'est une acception récente...). Action violemment nuisible (contre le milieu naturel) (voir Nuisance, pollution). L'agression du milieu par les altéragènes. En Technologie, action physique observée lors d'une collision entre véhicules (écrasements, torsions...). Agression de rigidité, agression de structure.

 

   De son côté, le Larousse encyclopédique en couleurs de 1977, indique, à partir de la même étymologie, attaque non provoquée et subite, prenant déjà comme exemple l'agression de la Pologne par Hitler. Il décline les dérivés du mot en plusieurs points :

- Agresser, soit attaquer sans avoir été provoqué ;

- Agresseur : celui qui attaque en premier : L'agresseur a presque toujours le bénéfice de la surprise ;

- Agressif, agressive : qui a un caractère d'agression. Par exemple Un discours agressif. Porté à attaquer ; querelleur : Un voisin agressif. Provoquant : Toilette agressive ;

- Agressivement : De façon agressive ;

- Agressivité ; Caractère agressif d'une personne, d'un animal ou d'une chose : Les rebelles font preuve d'agressivité.

Dernier développement, tiré de la psychanalyse : Selon l'hypothèse de Freud, très généralement acceptée (là, le dictionnaire simplifie un peu...) : l'agressivité est fonction de la frustration :

1) sa force dépend surtout de la motivation frustrée ;

2) plus l'inhibition de l'agression est forte, plus la tendance au déplacement est nette ;

3) la forme de l'agressivité est modifiée par la culture de l'individu.

 

L'évolution de l'usage du mot Agression

   Xavier PIN, Juriste et agrégé de droit privé et sciences criminelles, enseignant du droit à la Faculté de droit de l'Université Jean Moulin Lyon III, décrit l'évolution de l'usage du mot Agression. 

"Une agression, écrit-il notamment, est dans un sens courant, une forme de violence physique ou morale, brutale et soudaine. Dans un sens plus juridique, l'agression peut être définie comme une atteinte à la liberté ou à l'intégrité, réalisée au moyen de la contrainte, de la menace, la surprise, la répétition ou l'insistance. Tel est du moins ce qui ressort de l'analyse de quelques "agressions" qualifiées expressément ainsi par la loi. Ces agressions légalement définies ne sont pas nombreuses et leur apparition dans la loi est relativement récente. En effet, le mot "agression" ou l'adjectif "agressif" n'ont véritablement fait leur apparition en droit interne qu'à partir des années 1990. Plus exactement, c'est avec la réforme du Code pénal de 1992 que l'emploi de ces termes s'est généralisé sous la plume du législateur. Auparavant, une "agression" désignait presque exclusivement une atteinte contre l'autorité ou la Nation, et le mot, issu des relations internationales, était d'inspiration militaire ou guerrière. En ce sens, le Code de la défense dispose toujours que la politique de défense a pour objet d'assurer l'intégrité du territoire et la protection de la population contre les "agressions armées" (...), ou encore que le ministre de la Défense établit les directives générales relatives à la préparation et à la mise en oeuvre des mesures de défense opérationnelle du territoire à prendre "en cas de menace extérieure, d'agression ou d'invasion" (...).

Mais aujourd'hui, les occurrences non militaires du terme "agression" se sont multipliées. Par exemple, le Code de l'éducation indique que le règlement intérieur des établissements scolaires détermine les modalités selon lesquelles sont mises en application "les garanties de protection contre toute agression physique ou morale et le devoir qui en découle pour chacun de n'user d'aucune violence" (...). Et dans la loi pénale, le mot "agression" apparait de plus en plus pour désigner certains actes de violence entre particuliers. (...).

Cette évolution sémantique, poursuit le dirigeant de l'Institut de sciences criminelles de Grenoble, est intéressante en ce qu'elle consacre une certaine banalisation de l'agression, qui traduit sans doute un abaissement du seuil de la violence tolérée dans notre société. Et le phénomène est d'autant plus remarquable que, d'un point de vue juridique, la consécration légale de ces différentes formes d'agression n'avait rien de nécessaire. En effet, le mot n'est pas suffisamment précis pour répondre à lui seul au principe de la légalité criminelle qui veut que chaque citoyen connaisse à l'avance les incriminations prévues par la loi pénale et les sanctions que celui-ci fulmine, afin de pouvoir y conformer sa conduite. D'ailleurs, toutes les agressions ressenties, individuellement ou collectivement comme telles, ne sont pas systématiquement nommées par la loi. On songe notamment aux "agressions verbales". Sous forme d'expressions outrageantes, de propos méprisants ou d'invectives, ces agressions sont fréquentes là où la politesse recule. Pour autant, le législateur n'a pas éprouvé le besoin de les condamner formellement en les désignant comme telles : les termes d'"injures", d'"outrage" ou de "tapage" suffisent aisément à désigner le comportement réprouvé. Bien plus, au regard du principe de la légalité criminelle évoqué plus haut, ces derniers termes méritent d'être préférés à l'expression "agression verbale" car ils sont, à certains égards, plus précis et constituent par conséquent, de meilleurs remparts contre l'arbitraire du juge.

Cela dit, l'émergence du mot "agression" dans le domaine du droit pénal est aujourd'hui une réalité. Et la lecture des circonstances qui la caractérisent permet de mieux comprendre la notion, tout au moins en ce qui concerne les agressions contre les particuliers. En effet, pour les traditionnelles agressions entre États ou contre la Nation, qui constituent des cas de rupture de la paix, la question de leur définition juridique se double de considérations de haute politique qui suscitent encore des controverses. (...)"

 

Xavier PIN, Agression, dans Dictionnaire de la violence, PUF, 2011.

Relu le 17 janvier 2021

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