La communauté de Sant'Egidio, organisation catholique fondée en 1968, par Andrea RICCARDI (né en 1950), implantée d'abord dans les locaux de l'église Sant'Egidio à Rome, composée de plus de 15 000 membres, effectue un travail maintenu reconnu international en faveur de la solidarité et de la paix. Reconnue officiellement comme Association internationale de laïques par l'Eglise catholique en 1986, elle agit de manière complètement autonome par rapport à toutes les autres organisations officielles du Vatican. Son fonctionnement diffère de celui d'une ONG, d'une association humanitaire et a fortiori d''une organisation publique ou para-publique. Elle affiche une neutralité forte et il n'existe pas de modèle unique pour les différentes communautés Sant'Egidio réparties dans des pays très divers et dans des contextes sociaux très variés. C'est avant tout un vaste et dense réseau de personnes, qui se définissent comme des compagnons, qui font bénéficier à leur organisation de leurs compétences très variées pour soutenir des interventions internationales soutenues dans plusieurs domaines.
Ses activités se sitent sur plusieurs plans :
- lutte contre la pauvreté dans les villes ;
- abolition de la peine de mort (La communauté est cofondatrice de la Coalition mondiale contre la peine de mort) ;
- éducation dans les quartiers populaires ;
- accompagnement des communautés nomades ;
- présence auprès de personnes âgées dans des homes ;
- lutte contre le SIDA.
Elle organise annuellement des rencontres interreligieuses depuis 1986 et la Rencontre d'Asie organisée par Jean-Paul II. La conférence de chaque années est organisée autour d'un thème.
Dans ses statuts, approuvés par le Saint-Siège en 1986, se dégagent trois axes principaux qui définissent ses buts :
- l'évangélisation, surtout parmi les personnes les plus éloignées d'une expérience ou d'une pratique religieuses ;
- le service des plus pauvres, dans l'esprit conciliaire de "l'Eglise de tous et en particulier des pauvres" du pontificat de Jean XXIII ;
- le dialogue oecuménique en particulier en direction des Eglises orientales et le dialogue interreligieux en vue d'une coexistence pacifique avec les croyants des autres religions.
Même si le travail de médiation, d'intervention directe et non-violente dans un pays en situation de crise n'est pas à proprement parler la vocation première de Sant'Egidio, il faut parie intégrante de la vie de la communauté, qui mène son combat pour la paix en relation directe avec ses conceptions de justice économique. C'est depuis la fin des années 1980 que la communauté devient un acteur international très particulier. Elle est au coeur de différentes initiatives de dialogue, d'abord entre les religions et entre chrétien et laïcs puis entre parties prenantes dans des conflits armés particulièrement longs et durs.
La guerre, aussi bien culturelle qu'armée apparaît dans les années 1990, comme une douloureuse nécessité. Sant'Egidio ne croit pas à cet axiome présenté comme incontestable. Il ne s'agit pas de pacifisme de principe, mais d'un réalisme mûri à travers l'expérience pacificatrice acquise au cours des différents conflits de ces vingt dernières années. La communauté n'a pas seulement une position de "témoignage" en faveur de la valeur de la paix, mais elle agit et intervient de manière concrète pour rechercher la paix dans des contextes de conflits. Les compagnons de Sant'Egigio font figure de pacificateurs. Des groupes d'hommes et de femmes, inspirés religieusement, non professionnels de la diplomatie, déploient des énergies considérables dans l'instauration et la poursuite du dialogue entre communautés en conflit. Ils sont considérés par ceux qui exercent la diplomatie professionnelle (du bas en haut des hiérarchies) comme une entité avec laquelle il est intéressant d'avoir une discussion et de maintenir des contacts. Leurs interventions au Mozambique, au Salvador, en Algérie, au Guatémala, au Burundi, en Albanie, au Kosovo, au Liberia ou en Côte d'ivoire, souvent suivies d'effets consolidés, font de cette Communauté un partenaire de bien des organisations internationales et d'appareils diplomatiques étatiques.
Utilisant des techniques caractérisées par la réserve et l'aspect informel, en harmonie avec le travail officiel qu'accomplissent des gouvernements et des organisations intergouvernementales, ces compagnons travaillent comme des médiateurs, super partes, sérieusement voués à la cause de la paix, sans intérêts possibles ni politiques, ni économiques, ni de prestige international. Amité, dialogue, flexibilité sont les maîtres-mots d'une méthode éprouvée. Leurs instruments ne reposent pas sur des moyens financiers ou militaires. Les instruments "simples" du contact humain ou du raisonnement politique s'enracinent dans une légitimation morale très forte, celle des peuples qui veulent paix, et rapidement. Dépasser les blocages culturels et de perspective est le premier travail, il s'agit d'instaurer pas à pas la confiance pour réconcilier peu à peu des ennemis, avec le souci constant d'établir des garanties internationales et internes aux différentes étapes qui doivent mener vers la paix. Chercher ce qui unit, alors que la guerre affirme qu'il n'y a rien de commun, tracer des perspectives communes, mettre en place des situations bien plus bénéfiques que l'état de guerre et en faire prendre conscience, sont leurs objectifs obstinés.
Dans le site de la Communauté, www.santegidio.org, nous pouvons lire cette présentation de son action pour "la paix et l'humanisation du monde" : "L'amitié avec les pauvres a conduit Sant'Egidio à mieux comprendre que la guerre est la mère de toutes les pauvretés. C'est ainsi qu'aimer les pauvres, dans de nombreuses situations, est devenud travailler pour la paix, pour la protéger là où elle est menacée, pour aider à la reconstruire, en facilitant le dialogue là où il est perdu. Les moyens de ce service pour la paix et la réconciliation sont les moyens pauvres de la prière, de la parole, du partage des situations difficiles, la rencontre et le dialogue. Même là où on ne peut pas travailler pour la paix, la Communauté cherche à réaliser la solidarité et à apporter l'aide humanitaire aux populations civiles qui souffrent le plus à cause de la guerre. Ce sont les aspects peut-être les plus connus de Sant'Egidio, ceux dont même les mass medias parfois parlent sans toujours mettre en lumière, la continuité avec l'aide aux plus pauvres - présente dans le Communauté depuis ses débuts - et la racine évangélique. (...). C'est aussi à travers (les) expériences qu'a grandi la confiance de Sant'Egigio dans la "force faible" de la prière et dans le pouvoir de changement de la non-violence et de la persuasion. Ce sont les aspects de la vie du Seigneur Jésus lui-même qu'il a vécus jusqu'à la fin. Dans cette direction, la Communauté se met constamment au service du dialogue oecuménique et rinterreligieux. (...). C'est sur la base de (l')urgence évangélique que se situe la récente bataille pour un moratoire mondial de toutes les éxécutions capitales à partir de l'an 2000, une bataille que la Communauté a engagée au niveau international avec d'autres organisations. C'est un moment important qui voit un effort d'une intensité particulière de la part de Sant'Egidio et de tous ses membres dans chaque partie du monde où ils sont présents, pour affirmer la valeur de la vie, sans esception et à tous les niveaux. D'autres initiatives humanitaires ont la même racine évangélique et s'expriment comme une proposition pour tous les hommes et pour toutes les femmes de bonne volonté, indépendamment du credo religieux. Par exemple celle des mines antipersonnel, l'aide concrète aux réfugiés et aux victimes des guerres et des famines, comme dans le Sandan du Sud, au Burendi, en Albanie et au Kosovo, où les récentes actions pour venir en aide aux populations touchées par l'ouragan Mitch en Amérique Centrale ou pour obtenir la libération des esclaves, où cette pratique inhumaine est encore en usage."
Roberto Morozollo della ROCCA, L'art de la paix, La communauté de Sant'Egidio sur la scène internationale, Salvator, 2012 ; Emmanuel LUC, La communauté de Sant'Egigio, Servir, dialoguer, intervenir, dans Cahiers de la Réconciliation n°3, 1995.
Complété le 18 décembre 2012
PAXUS